Déontologie : l’impartialité du médecin expert

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Déontologie : l’impartialité du médecin expert

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Droit médical et déontologie des praticiens de santé

Déontologie : l’impartialité du médecin expert

La déontologie des praticiens de santé : rappel sur les règles d’impartialité du médecin expert.

L’article R. 4127-105 du code de la santé publique, dispose que :« Nul ne peut être à la fois médecin expert et médecin traitant d’un même malade.

Un médecin ne doit pas accepter une mission d’expertise dans laquelle sont en jeu ses propres intérêts, ceux d’un de ses patients, d’un de ses proches, d’un de ses amis ou d’un groupement qui fait habituellement appel à ses services ».

Dans son arrêt n° 461706 du 11 octobre 2023 le Conseil d’Etat a rappelé que :

« il appartient au juge, saisi d’un moyen mettant en doute l’impartialité d’un expert, de rechercher si, eu égard à leur nature, à leur intensité, à leur date et à leur durée, les relations directes ou indirectes entre cet expert et l’une ou plusieurs des parties au litige sont de nature à susciter un doute sur son impartialité. En particulier, doivent en principe être regardées comme suscitant un tel doute les relations professionnelles s’étant nouées ou poursuivies durant la période de l’expertise ».

Cette solution est déjà mise en œuvre par le juge administratif notamment dans des affaires relatives au droit de la construction (Conseil d’Etat n° 360598 du 19 avril 2013).

En reprenant ces considérations identiques, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a considéré dans son arrêt n° 21BX03948 du 9 novembre 2023, que :

« La seule circonstance que l’un des deux experts a reçu une fois en consultation l’enfant A, neuf ans avant la rédaction du rapport, n’est pas à elle seule de nature à susciter un doute sur son impartialité ».Dans le même sens, le Tribunal administratif de Nancy, a considéré dans son jugement n° 2101771 du 30 novembre 2023, que :

« Enfin, si le Pr G (praticien mis en cause) et le Dr D (médecin expert judiciaire) étaient attachés d’enseignement en même temps au sein de la faculté dentaire de Nancy en 1995, cette simple circonstance, intervenue vingt-deux ans avant la date d’expertise, sans qu’ils ne se soient revus depuis, ne démontre pas l’existence d’une relation directe ou indirecte de nature à remettre en cause l’impartialité de l’expert. Dans ces conditions, M. C n’est pas fondé à soutenir que l’expertise du Dr D s’est déroulée dans des conditions irrégulières ».

Dans son arrêt n° 461706 du 11 octobre 2023, le Conseil d’Etat précise que :

« 4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le docteur D… a déposé son rapport le 9 septembre 2021 et avait assuré au cours de l’année 2021, en qualité de médecin-conseil, plusieurs missions, dont certaines étaient encore en cours, pour le compte de la SHAM, assureur du CHRU de Rouen dont la responsabilité était recherchée par la MACIF. En jugeant que la MACIF n’était pas fondée à mettre en cause l’impartialité du docteur D…, eu égard, d’une part, aux obligations déontologiques et aux garanties qui s’attachent tant à la qualité de médecin qu’à celle d’expert désigné par une juridiction et, d’autre part, au déroulement des opérations d’expertise, tenues en présence de deux médecins-conseils de la MACIF, la cour administrative d’appel a inexactement qualifié les faits de l’espèce, alors d’ailleurs qu’il appartenait au médecin expert de refuser la mission d’expertise en application de l’article R. 4127-105 du code de la santé publique. La MACIF est par suite fondée à demander l’annulation de son arrêt ».

D’une part, les garanties qui découlent de l’application du code de la santé publique et d’autre part, celles qui découlent de l’organisation d’une expertise judiciaire au visa des dispositions du code de justice administrative, font obstacle à ce que l’expert, dans ce cas d’espèce, puisse accepter la mission et sa désignation.

Le Conseil d’Etat précise d’ailleurs qu’il appartenait au médecin expert lui-même, de refuser la mission d’expertise en application des dispositions de l’article R. 4127-105 du code de la santé publique.

Rappelons également que l’article R. 621-7 du code de justice administrative, dispose que : « L’expert garantit le caractère contradictoire des opérations d’expertise.

Les parties sont averties par le ou les experts des jours et heures auxquels il sera procédé à l’expertise ; cet avis leur est adressé quatre jours au moins à l’avance, par lettre recommandée.

Les observations faites par les parties, dans le cours des opérations, sont consignées dans le rapport.

L’expert recueille et consigne les observations des parties sur les constatations auxquelles il procède et les conclusions qu’il envisage d’en tirer. Toutefois, lorsque l’expert a fixé aux parties un délai pour produire leurs observations, il n’est pas tenu de prendre en compte celles qui lui sont transmises après l’expiration de ce délai ».

Il est de jurisprudence constante que respect du caractère contradictoire de la procédure d’expertise implique que les parties soient mises à même de discuter devant l’expert des éléments de nature à exercer une influence sur la réponse aux questions posées par la juridiction saisie du litige.

Ainsi, l’impartialité de l’expert s’apprécie d’une part, au regard d’éventuels liens avec les parties et d’autre part, au regard de l’organisation par ses soins, des mesures d’expertise.

Thomas PORCHET