Les implantations irrégulières de canalisation : la question de la responsabilité de l’administration

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Les implantations irrégulières de canalisation : la question de la responsabilité de l’administration

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Les implantations irrégulières de canalisation : la question de la responsabilité de l’administration

Il n’est pas rare hélas, ayant acheté une propriété immobilière, que les acquéreurs s’aperçoivent au moment où ils vont construire de la présence de canalisations d’eaux pluviales ou d’eaux usées, parfois importantes, dans le tréfonds de leur terrain.

Ces canalisations souvent implantées il y a de nombreuses années ne l’ont pas été à la faveur de servitudes ou de conventions.

Dans une décision du 11 février 2020 rendue par la cour administrative d’appel de Bordeaux sous le numéro 19 BX 02 411, la juridiction administrative est venue apporter d’intéressantes considérations sur la question de la compétence de la juridiction administrative notamment.

Elle juge que dans le cas d’une décision administrative portant atteinte à la propriété privée, le juge administratif est compétent pour statuer sur le recours en annulation d’une telle décision et le cas échéant pour adresser des injonctions à l’administration.

L’arrêt ajoute, et ça n’est pas là le moindre de ses intérêts, que le juge est également compétent pour connaître de conclusions tendant à la réparation des conséquences dommageables de cette décision administrative sauf si elle a pour effet l’extinction du droit de propriété.

Bien évidemment, dans cette dernière hypothèse, il s’agit ni plus ni moins d’une expropriation et seule la juridiction judiciaire est compétente pour fixer la juste indemnisation préalable à la prise de possession par la personne publique.

Dans l’hypothèse qu’a eu à connaître la cour de Bordeaux, il s’agissait d’une acquisition en septembre 2014 de parcelles, et de la découverte au cours de l’année 2015 de canalisations d’eau potable traversant trois des parcelles de la propriété sans avoir été déclarées ni n’avoir fait l’objet d’une servitude de passage légale ou conventionnelle.

Les propriétaires avaient donc demandé le retrait de ces canalisations et, confronté au refus du président du syndicat de déplacer les canalisations, avaient saisi le tribunal puis la cour.

Le tribunal administratif de Toulouse a de nouveau été saisi de la question, laquelle portait également sur les délais de recours contentieux.

La question de savoir si le retrait de telles canalisations est possible se pose à chaque fois qu’il est aussi possible de régulariser.

C’est la cour d’appel de Marseille dans une décision du 4 juillet 2019 rendue sous le numéro 18 M A00490 qui est venue apporter d’importantes considérations sur ce point.

L’hypothèse est la même, à savoir une commune puis une communauté d’agglomération en l’occurrence celle de Nîmes, qui est jugé comme ne disposant d’aucun titre l’autorisant à instaurer une servitude portant atteinte aux droits de propriété de la requérante, en l’occurrence des canalisations d’évacuation d’eaux usées.

Le juge administratif raisonne en matière de démolition d’un ouvrage public implanté de façon irrégulière.

Et il rappelle au cas particulier la jurisprudence en la matière selon laquelle il lui appartient pour déterminer en fonction de la situation de droit et de fait existant la date à laquelle il statue si sa décision implique qu’il ordonne la démolition de cet ouvrage, de rechercher d’abord si eu égard notamment au motifs de la décision, une régularisation appropriée est possible.

Dans la négative, il lui revient ensuite de prendre en considération les inconvénients que la présence de l’ouvrage entraîne pour les divers intérêts publics ou privés en présence et d’autre part les conséquences de la démolition pour l’intérêt général.

Rapprochant ces éléments, le juge administratif doit donc s’interroger sur le point de savoir si la démolition n’entraîne pas une atteinte excessive à l’intérêt général.

Dans le cas de la communauté d’agglomération de Nîmes et de cet arrêt, la cour d’appel de Marseille a considéré qu’une régularisation de l’implantation semblait possible si la propriétaire consentait à conclure une convention de servitude d’aqueduc.

C’est au visa de cette possibilité de régularisation que la démolition a été refusée, considérant une atteinte excessive à l’intérêt général attaché au service public d’assainissement dont la requérante bénéficie par ailleurs ainsi que le rappelle la cour.

Dans ces conditions, seule une mesure de régularisation appropriée a été imposée au syndicat qui a disposé d’un délai de six mois pour la mettre en œuvre.

La question de l’implantation irrégulière de canalisations dans les propriétés privées est loin d’être résolue, mais les deux arrêts ainsi cités apportent d’importants éclairages sur la façon dont les collectivités et les particuliers peuvent la gérer.

Thomas Drouineau
DROUINEAU 1927
Ancien Bâtonnier
Avocat spécialiste en droit public