Un fonctionnaire titulaire, élu d’une commune, peut-il être nommé président d’une société d’économie mixte locale, en application du régime juridique de l’exercice d’une activité accessoire

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Un fonctionnaire titulaire, élu d’une commune, peut-il être nommé président d’une société d’économie mixte locale, en application du régime juridique de l’exercice d’une activité accessoire

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Un fonctionnaire titulaire, élu d’une commune, peut-il être nommé président d’une société d’économie mixte locale, en application du régime juridique de l’exercice d’une activité accessoire

Les articles L. 1521-1, L. 1522-1 du code général des collectivités territoriales et L. 225-51-1 du code de commerce, régissent la gouvernance de la SEM, société anonyme.

En premier lieu, l’article 25 septies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires, dispose que :
« I. – Le fonctionnaire consacre l’intégralité de son activité professionnelle aux tâches qui lui sont confiées. Il ne peut exercer, à titre professionnel, une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit, sous réserve des II à V du présent article.
Il est interdit au fonctionnaire :
1° De créer ou de reprendre une entreprise lorsque celle-ci donne lieu à immatriculation au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers ou à affiliation au régime prévu à l’article L. 613-7 du code de la sécurité sociale, s’il occupe un emploi à temps complet et qu’il exerce ses fonctions à temps plein ;
2° De participer aux organes de direction de sociétés ou d’associations à but lucratif (…) ».

Ainsi par principe, un fonctionnaire ne peut participer aux organes de direction d’une société.

Or, une SEM est une personne morale de droit privé, régie par les dispositions du code de commerce.

L’article L. 1524-5 du code général des collectivités territoriales, dispose que :
« Toute collectivité territoriale ou groupement de collectivités territoriales actionnaire a droit au moins à un représentant au conseil d’administration ou au conseil de surveillance, désigné en son sein par l’assemblée délibérante concernée.
(…).
Les personnes qui assurent la représentation d’une collectivité territoriale ou d’un groupement au sein du conseil d’administration ou de surveillance d’une société d’économie mixte doivent respecter, au moment de leur désignation, la limite d’âge prévue au premier alinéa des articles L. 225-19 et L. 225-70 du code de commerce ».

En application des dispositions de l’article L. 1524-5 du code général des collectivités territoriales, un élu local président ou président directeur général d’une SEM, agit en tant que mandataire de la collectivité territoriale, dont il est issu.

Dans ces conditions, l’élu représentant de la collectivité territoriale, participe à l’institution de la SEM, non pas à titre d’activité privée, mais au titre d’une activité découlant de la représentation de son mandat électif.

Les dispositions relatives à l’exercice d’une activité privée ne sont pas applicables au cas de l’espèce.

Ainsi, le mandat électif fait obstacle à l’application du principe d’interdiction de participation d’un fonctionnaire aux organes de direction d’une SEM et permet donc l’intervention du fonctionnaire dans l’animation de ces organes de direction. Il conviendra néanmoins de qualifier l’activité et le fonctionnement juridique de la SEM.

En deuxième lieu, le IV de l’article 25 septies de la loi n° 83-634, relatif à l’activité accessoire, dispose que :
« Le fonctionnaire peut être autorisé par l’autorité hiérarchique dont il relève à exercer à titre accessoire une activité, lucrative ou non, auprès d’une personne ou d’un organisme public ou privé dès lors que cette activité est compatible avec les fonctions qui lui sont confiées et n’affecte pas leur exercice. Par dérogation au 1° du I du présent article, ces activités peuvent être exercées sous le régime prévu à l’article L. 133-6-8 du code de la sécurité sociale.
Il peut notamment être recruté comme enseignant associé en application de l’article L. 952-1 du code de l’éducation ».

Ainsi, par principe, l’agent peut être autorisé à cumuler une activité accessoire avec son activité principale, que si cette activité ne porte pas atteinte au fonctionnement normal, à l’indépendance ou à la neutralité du service ou ne mette pas l’intéressé en situation de méconnaître l’article 432-12 du code pénal.

Ainsi, pour que l’activité accessoire soit compatible avec l’activité principale, cette dernière doit remplir les conditions suivantes :
L’activité d’administrateur, de président ou de président directeur général d’une SEM ne doit pas porter atteinte au fonctionnement normal du service public de l’agent en général et du cœur d’activité même de l’intéressée, en particulier ;
L’activité au sein de la SEM ne doit pas porter atteinte à l’indépendance ou à la neutralité du service public concerné ;
Cette activité ne doit pas mettre l’intéressé en situation de prise illégale d’intérêts ;
Cette activité peut être exercée auprès d’une personne publique, ou d’une personne privée.

La SEM est une personne privée, relevant des dispositions du code de commerce.

L’article 11 du décret n° 2020-69 du 30 janvier 2020 relatif aux contrôles déontologiques dans la fonction publique et entré en vigueur depuis le 1er février 2020, prévoit les activités qui peuvent être susceptibles d’être autorisées. Cet article dispose que :
« Les activités exercées à titre accessoire susceptibles d’être autorisées sont les suivantes :
(…) ;
Activité d’intérêt général exercée auprès d’une personne publique ou auprès d’une personne privée à but non lucratif (…) ».

Sont donc susceptibles d’être autorisées, les activités d’intérêt général exercées auprès d’une personne privée à but non lucratif.

Il s’agit ici de se référer non pas au caractère lucratif de l’activité accessoire, mais bien au caractère lucratif ou non de la SEM.

En effet, l’activité susceptible d’être autorisée doit remplir un double critère :
Un critère matériel tenant à la qualification d’activité d’intérêt général ;
Un critère organique tenant à l’existence d’une personne privée à but non lucratif.

Ces dispositions devant être strictement interprétées, l’activité, qu’elle soit bénévole ou rémunérée, exercée auprès d’une personne privée à but lucratif, n’est pas susceptible d’être autorisée à titre accessoire.

Elle est donc prohibée.

La nature de l’activité assurée par la SEM, déterminera donc le régime juridique des obligations auxquelles l’administrateur fonctionnaire est soumis.

En troisième lieu, l’article 12 du décret n° 2020-69 du 30 janvier 2020, dispose que :
« Préalablement à l’exercice de toute activité accessoire soumise à autorisation, l’intéressé adresse à l’autorité hiérarchique dont il relève, qui lui en accuse réception (…) ».

Toutefois, chacun peut librement exercer un mandat électif, sauf inéligibilité ou incompatibilité.

Or, c’est bien dans le cadre d’un mandat électif que l’administrateur d’une SEM, au sein de laquelle il n’agit pas à titre privé, mais à titre de représentant de la collectivité locale de laquelle il est issu, peut prétendre à assumer les fonctions de dirigeant.

Ce mandat électif libre, permet à l’administrateur d’assumer les fonctions de dirigeant. L’on peut considérer que les fonctions engendrées par le mandat électif originel, comme la participation aux organes de la SEM, ne sont pas « organiquement » soumises à autorisation.

Néanmoins, l’exercice effectif de ces fonctions au sein de la SEM est quant à lui « fonctionnellement » soumis à autorisation et ce, en application des dispositions précitées de l’article 12 du décret n° 2020-69.

En effet, l’administrateur peut être nommé président ou président directeur général, et, préalablement à l’exercice effectif de cette activité accessoire, il adresse à l’autorité dont il relève la demande d’autorisation d’exercer effectivement ces attributions.

À l’occasion de la communication de ces éléments, l’intéressé devra préciser qu’il n’agit pas à titre personnel, mais bien en tant que représentant de la collectivité locale dont il est issu.

Thomas Porchet
DROUINEAU 1927
Avocat