Procédure de mise en sécurité : le constat préalable de l’état de péril

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Procédure de mise en sécurité : le constat préalable de l’état de péril

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Procédure

Procédure de mise en sécurité : le constat préalable de l’état de péril

Il n’est pas nouveau que l’ordonnance n° 2020-1144 du 16 septembre 2020 entrée en vigueur le 1er janvier 2021, et qui s’inscrit dans la lignée de la loi ELAN de 2018, a fortement modifié les polices des immeubles, locaux et installations, afin de les harmoniser et les simplifier. Jusqu’alors, plus d’une dizaine de procédure relevant de différents codes coexistaient et étaient assez complexes à appréhender. Désormais, une nouvelle et unique police administrative spéciale de la sécurité et de la salubrité des immeubles a été mise en place. Cette police a pour objet de protéger la sécurité et la santé des personnes en remédiant, entre autres, aux risques présentés par les murs, bâtiments ou édifices quelconques qui n’offrent pas les garanties de solidité nécessaires au maintien de la sécurité des occupants et des tiers (article L. 511-2 du code de la construction et de l’habitation). Il s’agit là de ce que l’on dénommait anciennement la mise en œuvre des procédures de péril, dorénavant appelées procédures de mise en sécurité.

En effet, dans le cadre de cette police spéciale, l’autorité administrative compétente doit mettre en place la procédure de mise en sécurité si le bien présente des risques pour la sécurité des occupants et des tiers, sous réserve que les désordres proviennent d’une cause intrinsèque à celui-ci. Il sera d’ailleurs précisé que la responsabilité de la commune est engagée pour carence du maire dans l’exercice de ses pouvoirs de police en matière de bâtiment menaçant ruine, si ce dernier a connaissance du caractère dangereux de l’immeuble et qu’il s’est abstenu de prendre les mesures utiles pour y pallier (voir en ce sens CE, 27 septembre 2006, n° 284022). Il apparait donc indispensable pour le maire, ou le président de l’EPCI selon le cas, de s’interroger sur les risques présentés par le bâtiment en cause en appréciant, au préalable, son état. A la lecture de l’article L. 511-8 du CCH, un arrêté de mise en sécurité doit être précédé soit d’un rapport des services communaux ou intercommunaux compétents, soit d’un rapport de l’expert désigné par le tribunal administratif. Plus précisément, l’ordonnance du 16 septembre 2020 permet désormais à l’autorité compétente d’une part, de faire procéder à toutes visites qui lui paraissent utiles afin d’évaluer les risques présentés par ces bâtiments (article L. 511-7 du CCH), et d’autre part, de demander à la juridiction administrative la désignation d’un expert, qu’il y ait danger imminent ou non (article L. 511-8 du CCH).

Autrement dit, la constatation de l’état du bien, préalable indispensable à toute mise en œuvre des procédures de mise en sécurité, peut désormais se faire de deux manières différentes. Le choix entre ces deux possibilités s’avère toutefois limité si l’administration ne possède pas de services compétents en la matière. En effet, il apparait cohérent qu’en l’absence de telles compétences au sein de la commune ou de l’EPCI, il sera nécessaire de se tourner vers une demande de désignation d’un expert auprès du tribunal administratif qui sera alors plus à même de déceler si le bien présente un risque pour les occupants et les tiers. Ce choix est d’autant plus limité que l’ordonnance du 16 septembre 2020 a abandonné toute notion « d’homme de l’art » qui, jusqu’alors, pouvait intervenir à la demande de l’autorité compétente pour faire ce constat. A cet égard, le Ministère auprès de la transition écologique a eu l’occasion de préciser que cette notion avait été supprimée en l’absence de signification juridique. Par ailleurs, en cas d’opposition de l’occupant du bien à toute visite, les solutions offertes pour y remédier seront différentes selon qu’il s’agit d’un constat par l’administration elle-même ou par un expert désigné par le tribunal. En effet, si l’administration procède elle-même à la visite des lieux et que l’occupant s’y oppose, ou que la personne ayant qualité pour autoriser l’accès aux lieux n’a pu être atteint, alors l’autorisation du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire sera nécessaire (article L. 511-7 du CCH). L’administration ne pourra pas procéder à la visite des lieux avant l’autorisation du juge des libertés et de la détention. A mon sens, il en ira différemment si la visite des lieux est effectuée par l’expert désigné par le tribunal administratif. En effet, si l’occupant refuse l’accès au bien, alors il s’agit là d’une obstruction à l’exécution de l’ordonnance prise par le juge. Dans ces circonstances, le concours de la force publique peut être sollicité. Sur ce point, il sera rappelé qu’aux termes de l’article L. 153-1 du code des procédures civiles d’exécution, « l’Etat est tenu de prêter son concours à l’exécution des jugements et des autres titres exécutoires ». Il ne fait que peu de doute que le concours de la force publique doit être accordé s’il s’agit de l’exécution d’une ordonnance du juge, à partir du moment où la décision de justice a force exécutoire (CE, 28 novembre 2014, n° 364391). L’on aurait pu également s’interroger sur la possibilité de présenter cette réquisition en dehors de toute action d’un huissier. En effet, l’article L. 153-2 du code des procédures civiles d’exécution, précise que « l’huissier de justice chargé de l’exécution peut requérir le concours de la force publique ». L’article R. 153-1 du même code, ne mentionne également que le cas où l’huissier de justice est dans l’obligation de requérir le concours de la force publique. Néanmoins, et à mon sens, la réquisition du concours de la force publique ne semble pas restreinte au seul huissier de justice (voir en ce sens : CE, 10 février 2014, n° 350265, le propriétaire d’un bien n’est pas obligé de faire appel à un huissier de justice pour solliciter le concours de la force publique). Par conséquent, le concours de la force publique peut être sollicité lorsque l’occupant s’oppose à l’exécution de l’ordonnance du juge administratif. Pour résumer, les pouvoirs d’action du maire ou du président de l’EPCI seront différents en cas d’opposition de l’occupant à toute visite des lieux :

  • Si la visite des lieux est effectuée par l’administration elle-même, il sera nécessaire de saisir le juge des libertés et de la détention pour obtenir son autorisation préalable ;
  • Si la visite des lieux est effectuée par l’expert désigné par le tribunal administratif, le concours de la force publique devra être sollicité.

En tout état de cause, si le juge des libertés et de la détention a donné son autorisation pour visiter les lieux, il n’en demeure pas moins que l’occupant peut toujours s’opposer à la visite des lieux, ce qui nécessitera alors éventuellement le concours de la force publique. A mon sens, l’autorité administrative aura ainsi tout intérêt à solliciter la désignation d’un expert auprès du tribunal administratif s’il entrevoit une possible opposition à la visite des lieux.

Auteur
Julia FINKELSTEIN